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L’index mesurant la vulnérabilité des forêts tropicales suffira-t-il à les sauver ?

Écrit par  Déc 22, 2021

L’Amazonie n’est malheureusement qu’une petite partie du problème.

Les forêts tropicales, de l’Indonésie à l’Amérique centrale en passant par Madagascar et les jungles du Mékong, sont en train d’être décimées ou brûlées pour faire de la place à des ranches, à des fermes et à des plantations de palmiers à huile ou bien pour créer des exploitations de bois, construire des routes ou des bâtiments. Dans le monde, jusqu’à 20 % des forêts tropicales ont été abattues depuis les années 1990, tandis que 10 % supplémentaires ont été endommagées par les températures plus élevées, les saisons sèches plus longues et les sécheresses plus fréquentes induites par le changement climatique.

Une équipe de plus de cinquante éminents chercheurs et défenseurs de l’environnement a réalisé une analyse qui montre que ces bouleversements impactent lourdement ces forêts humides et denses. Aux quatre coins des tropiques, les forêts perdent leur capacité à piéger le carbone et à recycler l’eau, et elles sont plus sujettes à l’effondrement qu’on ne le pensait. Au vu de la trajectoire climatique actuelle et de l’occupation des sols toujours croissante, les forêts tropicales pourraient même se mettre à rejeter du carbone dans l’atmosphère.

Certaines régions changent plus vite que d’autres. Cette équipe d’experts, montée par la National Geographic Society avec le soutien de Rolex, a juxtaposé 40 années de données satellites à des rapports sur les forêts afin de créer un « index de vulnérabilité » dont les chercheurs ont l’intention de se servir dans les années à venir pour savoir quelles parcelles ont le plus besoin d’aide. Leurs recherches ont été publiées le 23 juillet dans la revue One Earth.

Si on leur en demande trop, de vastes portions de forêt tropicale pourraient être confrontées à une mortalité élevée de leurs arbres ou pourraient se transformer en régions boisées desséchées semblables à des savanes. Cela dévasterait certaines les régions les plus riches en faune de la planète et aggraverait potentiellement le dérèglement climatique, car les forêts tropicales intactes absorbent d’ordinaire de grandes quantités de dioxyde de carbone. Si un tel bouleversement se produit en général de manière graduelle, les chercheurs craignent que certaines forêts, et en particulier l’Amazonie, se transforme de manière soudaine.

« Il me semble que tout le monde est convaincu que c’est en train de mal se passer », commente Kristofer Covey, écologue et biochimiste au Skidmore College et co-auteur de l’étude. « Là, le but est de comprendre. Qu’est-ce qui va mal, et à quel point ? Et à quel endroit, et dans quelle mesure ? Et est-ce que nous pouvons ensuite utiliser ces informations pour prendre de meilleures décisions à l’avenir ? »

Ils espèrent que cette approche mènera à la création d’un système d’alerte permettant d’allouer les ressources de protection de l’environnement, qui sont limitées, vers les forêts les plus à risque.

« Le public devrait comprendre qu’il ne s’agit pas uniquement de déforestation », explique Sassan Saatchi, auteur principal de l’étude et spécialiste du carbone des forêts au laboratoire Jet Propulsion de la NASA. « Le fonctionnement des forêts est en train de changer. Depuis l’an 2000 environ, nous observons un nouveau phénomène. L’impact du changement climatique s’accélère. »