Depuis 1947, les experts du Bulletin of Atomic Scientists règlent l’horloge de l’Apocalypse qui symbolise, à minuit, la fin du monde. Lors de leur dernière mise à jour, ils l’ont réglé à seulement 100 secondes de la fin. Jamais elle n’a été si avancée. Les principales menaces de l’humanité restent la guerre nucléaire et le changement climatique. Mais l’aggravation provient, pour les scientifiques, surtout de l’incapacité des décideurs mondiaux à répondre à l’urgence.
À travers le monde, face à une forme de déni de la réalité, beaucoup appellent à réécouter les scientifiques. Jeudi 22 janvier, ils ont pris la parole et nous aurions bon compte de les écouter. Les membres du Bulletin of Atomic Scientists, un groupe d’experts multidisciplinaires créé en 1947 par les scientifiques du projet Manhattan, ont mis à jour la Doomsday Clock, l’horloge de l’apocalypse. Sur cette horloge symbolique, minuit marque la fin du monde.
Ils viennent d’avancer les aiguilles à 23h58min20sec. Nous sommes donc à 100 secondes de l’apocalypse. Jamais l’aiguille n’a été aussi proche de l’heure fatidique. Auparavant elle avait atteint deux fois 23h58 : en 1953 au sommet des tensions de la guerre froide et en 2018 en raison du changement climatique. "Nous avons banalisé un monde très dangereux en termes de risques de guerre et de réchauffement", déplore Robert Rosner, Président du bureau science et sécurité du Bulletin.
Des outils de contrôle qui s’érodent
Et dans l’immédiat, les scientifiques ne voient aucun espoir que l’horloge recule. "L’humanité continue de faire face à deux dangers existentiels simultanés - la guerre nucléaire et le changement climatique - qui sont aggravés par la guerre de l’information, qui affaiblit la capacité de la société à réagir. La situation sur le plan de la sécurité internationale est désastreuse. Non seulement parce que ces menaces existent, mais parce que les dirigeants mondiaux ont laissé s’éroder les outils politiques internationaux qui les gèrent", écrivent-ils.
La première menace est celle du retour de la course à l’armement nucléaire, du fait de l’affaiblissement, si ce n’est de la disparition, des traités sur la prolifération. "Les conflits politiques concernant les programmes nucléaires en Iran et en Corée du Nord ne sont toujours pas résolus et ne font qu’empirer. La coopération américano-russe sur le contrôle des armements et le désarmement est pratiquement inexistante", explique le bulletin. "Une guerre nucléaire mettant fin à la civilisation - qu'elle soit déclenchée à dessein, par erreur ou à cause d’une simple mauvaise communication - est une possibilité réelle", décrivent-ils.
Sur le climat, les scientifiques constatent l’aggravation des évènements climatiques extrêmes, des feux géants, de la fonte des glaciers... Ils se félicitent de voir la jeunesse mondiale se mobiliser mais dénoncent très fermement la faible réponse politique. "De nombreux scientifiques utilisent le terme urgence climatique. Mais les politiques et les actions proposées par les gouvernements ne sont guère des réponses à une urgence". "Lors des réunions sur le climat de l’ONU l’année dernière, les délégués nationaux ont prononcé de beaux discours mais ont présenté peu de plans concrets pour limiter davantage les émissions de CO2".
Saper la paix et la planète
Enfin ces deux menaces existentielles sont accentuées par une guerre de la désinformation. "De nombreux gouvernements ont utilisé des campagnes de désinformation cybernétiques pour semer la méfiance envers les institutions et entre les nations, sapant ainsi les efforts nationaux et internationaux pour favoriser la paix et protéger la planète". Sans compter que ces menaces visibles cachent d’autres sources d’inquiétudes comme le développement des armes autonomes contrôlées par des intelligences artificielles, la guerre pour l’espace, le développement d’armes supersoniques ou encore les menaces d’épidémies.
La Présidente du Bulletin of Atomic Scientists, Rachel Bronson, spécialiste de la géopolitique de l’énergie, n’a pas de mots assez durs pour dénoncer la situation : "Si les politiques échouent à agir, les citoyens du monde devront faire écho aux paroles de Greta Thunberg et dire ‘Comment osez-vous ? ‘". C’est l’accusation que la jeune suédoise avait lancée lors de l’Assemblée générale de l’ONU en 2019. Elle ajoute : "Nous sommes maintenant confrontés à une véritable urgence - une situation des affaires du monde absolument inacceptable qui a éliminé toute marge d'erreur ou toute possibilité de retard supplémentaire".
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