Baye Salla Mar

Baye Salla Mar

L’épidémie de coronavirus Covid-19 en cours, qui a débuté à Wuhan à la fin de l’année dernière, illustre bien la menace que représentent les maladies infectieuses émergentes, non seulement pour la santé humaine et animale, mais aussi pour la stabilité sociale, le commerce et l’économie mondiale.

Or de nombreux indices portent à croire que la fréquence des émergences de nouveaux agents infectieux pourrait augmenter dans les décennies à venir, faisant craindre une crise épidémiologique mondiale imminente. En effet, les activités humaines entraînent de profondes modifications de l’utilisation des terres ainsi que d’importants bouleversements de la biodiversité, en de nombreux endroits de la planète.

Ces perturbations se produisent dans un contexte de connectivité internationale accrue par les déplacements humains et les échanges commerciaux, le tout sur fond de changement climatique.

Il s’agit là des conditions optimales pour favoriser le passage à l’être humain de micro-organismes pathogènes provenant des animaux. Or, selon l’OMS, les maladies qui résultent de telles transmissions comptent parmi les plus dangereuses qui soient.

Identifier les nouvelles menaces

Fièvre hémorragique de Crimée-Congo, virus Ebola et maladie du virus de Marburg, fièvre de Lassa, coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) et syndrome respiratoire aiguë sévère (SRAS), Nipah et maladies hénipavirales, fièvre de la vallée du Rift, Zika…

Toutes ces maladies ont en commun de figurer sur la liste « Blueprint des maladie prioritaires », établie par l’OMS en 2018.

Les maladies listées ici sont considérées comme des urgences sur lesquelles doivent se concentrer les recherches. Elles présentent en effet un risque de santé publique à grande échelle, en raison de leur potentiel épidémique et de l’absence ou du nombre limité de mesures de traitement et de contrôle actuellement disponibles.

Cette liste comporte également une « maladie X » : ce terme énigmatique désigne la maladie qui sera responsable d’une épidémie internationale d’ampleur, causée par un pathogène actuellement inconnu. L’OMS ne doute pas qu’elle puisse survenir, et demande donc à la communauté internationale de se préparer en prévision d’un tel scénario catastrophe.

Actuellement, la réponse des autorités de santé publique face à ces maladies infectieuses émergentes consiste à « prendre de l’avance sur la courbe », c’est-à-dire à identifier les facteurs environnementaux susceptibles de déclencher l’émergence. Malheureusement, notre compréhension de la façon dont font surface les nouvelles menaces infectieuses demeure encore limitée.

Mais une chose est sûre, les animaux seront très probablement impliqués dans les prochaines épidémies. Car c’est un autre point commun des maladies de cette liste dressée par l’OMS : toutes peuvent être classées comme des infections virales zoonotique.

Les animaux largement impliqués dans les nouvelles épidémies

Au cours des quatre dernières décennies, plus de 70 % des infections émergentes se sont avérées être des zoonoses, autrement dit des maladies infectieuses animales transmissibles à l’être humain.

Au plus simple, ces maladies incluent un seul hôte et un seul agent infectieux. Cependant, souvent plusieurs espèces sont impliquées, ce qui signifie que les changements de biodiversité ont le potentiel de modifier les risques d’exposition à ces maladies infectieuses liées aux animaux et aux plantes.

On pourrait à ce titre penser que la biodiversité représente une menace : puisqu’elle recèle de nombreux pathogènes potentiels, elle accroît le risque d’apparition de nouvelles maladies.

Pourtant, curieusement, la biodiversité joue également un rôle protecteur vis-à-vis de l’émergence des agents infectieux. En effet, l’existence d’une grande diversité d’espèces hôtes peut limiter leur transmission, par un effet de dilution ou par effet tampon.

La perte de biodiversité augmente la transmission des agents pathogènes

Si toutes les espèces avaient le même effet sur la transmission des agents infectieux, on pourrait s’attendre à ce qu’une baisse de la biodiversité entraîne de façon similaire une baisse de la transmission des agents pathogènes. Or il n’en est rien : ces dernières années, les études montrent de façon concordante que les pertes de biodiversité ont tendance à augmenter la transmission des agents pathogènes, et la fréquence des maladies associées.

Cette tendance a été mise en évidence dans un grand nombre de systèmes écologiques, avec des types hôtes-agents et des modes de transmission très différents. Comment s’explique cette situation ? La perte de biodiversité peut modifier la transmission des maladies de plusieurs façons :

1) En changeant l’abondance de l’hôte ou du vecteur. Dans certains cas, une plus grande diversité d’hôtes peut augmenter la transmission des agents, en augmentant l’abondance des vecteurs ;

2) En modifiant le comportement de l’hôte, vecteur ou parasite. En principe, une plus grande diversité peut influencer le comportement des hôtes, ce qui peut avoir différentes conséquences, qu’il s’agisse d’une augmentation de la transmission ou de l’altération de l’évolution des dynamiques de virulence ou des voies de transmission. Par exemple, dans une communauté plus diverse, le ver parasitaire qui est responsable de la bilharziose (maladie qui affecte plus de 200 millions de personnes dans le monde) a plus de chance de se retrouver dans un hôte intermédiaire inadéquat. Ceci peut réduire la probabilité de transmission future à l’humain de 25 à 99 % ;

3) En modifiant la condition de l’hôte ou du vecteur. Dans certains cas, dans des hôtes à fortes diversités génétiques, les infections peuvent être réduites, voire induire des résistances, ce qui limite de fait la transmission. Si la diversité génétique se réduit parce que les populations diminuent, la probabilité qu’apparaissent des résistances diminue également.

Dans ce contexte, la perte de biodiversité en cours est d’autant plus inquiétante. Les estimations actuelles suggèrent par exemple qu’au moins 10 000 à 20 000 espèces d’eaux douces ont disparu ou sont à risque de disparaître. Les taux de déclins observés actuellement rivalisent avec ceux des grandes crises du passé, telles que celle qui a marqué la transition entre Pléistocène et Holocène, voici 12 000 ans, et qui s’est accompagné de la disparition de la mégafaune, dont le mammouth laineux était un des représentants emblématiques.

Mais la perte de biodiversité n’est pas le seul facteur influant sur l’émergence de nouvelles maladies.

Le changement climatique et les activités humaines

C’est le déplacement de l’empreinte géographique des pathogènes et/ou de l’hôte qu’ils infectent qui conduit à l’émergence de nouvelles maladies infectieuses. À ce titre, l’imprévisibilité croissante du climat mondial et les interactions locales homme-animal-écosystème, de plus en plus étroites dans certains endroits de la planète, jouent un rôle majeur dans l’émergence de nouvelles infections au sein des populations humaines.

Ainsi, l’augmentation des températures moyennes aurait eu un effet significatif sur l’incidence de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, causée par un virus transmis par les tiques, ainsi que sur la durabilité du virus Zika, transmis par les moustiques dans les régions subtropicales et tempérées.

La consommation de viande de brousse et le commerce d’animaux, résultant de la demande croissante en protéines animales, provoquent aussi des changements importants dans les contacts entre les êtres humains et les animaux. Des études ont démontré que les flambées de SRAS et d’Ebola étaient directement liées à la consommation de viande de brousse infectée. En outre, la fièvre de Lassa et les maladies dues aux virus Marburg et Ebola prospèrent en Afrique de l’Ouest et du Centre, où la consommation de viande de brousse est quatre fois supérieure à celle de l’Amazonie, pourtant plus riche en biodiversité.

Autre risque : l’expansion de l’agriculture et de l’élevage. Afin de répondre à la demande toujours croissante des populations humaines, de nouveaux espaces doivent être conquis, en déforestant et en défrichant. Or on sait que cette réaffectation des terres peut déclencher l’émergence des maladies infectieuses, en favorisant les contacts avec des organismes jusqu’ici rarement rencontrés. Ainsi, dans les îles de Sumatra, la migration des chauves-souris fruitières causée par la déforestation dû aux incendies de forêt a conduit à l’émergence de la maladie de Nipah chez les éleveurs et les personnels des abattoirs en Malaisie.

Des émergences inévitables

Les relations entre la biodiversité des espèces hôtes et celle des parasites et microbes pathogènes sont complexes. En modifiant la structure des communautés, tous ces changements environnementaux risquent d’entraîner une modification des schémas épidémiologiques existants.

Dans ce contexte, les populations humaines peuvent se retrouver au contact d’un animal porteur d’un virus capable de les contaminer. Un cycle d’infections peut alors se mettre en place. Il débute par des cas sporadiques de transmission de l’animal à l’être humain, appelé « virus chatter » (« bavardage viral »). Ensuite, à mesure que les cycles se multiplient, l’émergence de la transmission interhumaine devient inévitable.

Une fois l’épidémie déclenchée, la rapidité de réaction est primordiale. Outre les mesures sanitaires de rigueur, lorsque le temps manque pour mener des études épidémiologiques appropriées les modélisations mathématiques peuvent être d’un grand secours pour évaluer rapidement l’efficacité de la prévention, et anticiper l’évolution de la maladie.

Mais appréhender la complexité des interactions entre réservoir naturel, agent pathogène et hôte(s) intermédiaire(s) reste un défi de taille lorsqu’il s’agit d’intervenir rapidement pour arrêter la transmission de la maladie. L’exemple du COVID-19 l’illustre une nouvelle fois : plus de deux mois après les premières infections, les divers maillons animaux de la chaîne de transmission de l’épidémie restent à identifier.

Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)

Doctoral Student, Institut de recherche pour le développement (IRD)

Le Parlement européen a voté en faveur de nouveaux projets d'infrastructures gazières au sein de l'Union. Deux récentes études appelaient pourtant à s'y opposer en vertu de l'objectif de neutralité carbone que s'est fixé Bruxelles dans le cadre du Green deal. Les experts mettent aussi en avant l'inutilité de ces projets en termes de sécurité d'approvisionnement et alertent sur les milliards d'euros de perte de valeur d'actifs qui vont en découler. 

C’est un premier test raté pour la Commission européenne, emmenée par Ursula von der Leyen qui a fait de l’urgence climatique son cheval de bataille. Les députés européens ont voté, ce mercredi 12 février, en faveur du financement de 32 nouvelles infrastructures gazières (principalement des gazoducs, quelques terminaux GNL et des installations de stockage). Celles-ci font partie d’une liste plus large de "projets d’intérêt commun" (PCI), qui recense l’ensemble des chantiers d’infrastructures énergétiques éligibles aux fonds communautaires. Elle a été établie par la précédente commission européenne, présidée par Jean-Claude Juncker.

"Le Parlement européen choisit de préserver les énergies fossiles, en s'opposant à notre proposition. Mais ce n'est pas fini. Nous étions 103 signataires, 169 votant.e.s, et nous continuerons à réclamer des investissements cohérents, qui garantissent un avenir et climat stable !" a réagi l'eurodéputée française Marie Toussaint.

Pascal Canfin, président de la commission environnement, fait partie des députés à avoir validé la liste PCI, après avoir obtenu des garanties de la part de Bruxelles. "Nous avons développé une alternative à l’objection, pour ne pas ralentir le financement potentiel de projets nécessaires, explique-t-il. A la veille du vote, la Commission européenne a entendu la demande du Groupe Renew portée par la délégation Renaissance. Frans Timmermans, le Vice-président en charge du Green Deal, a déclaré que 'pour recevoir des fonds européens, les projets de la liste PCI devront soutenir nos ambitions dans le cadre du Green Deal'".

Des projets inutiles

Parmi les projets inclus dans la liste PCI, il y a par exemple le gazoduc trans-adriatique (TAP) traversant l'Italie, l'Albanie et la Grèce, le terminal de GNL Shannon en Irlande, pour importer du gaz des États-Unis, le terminal flottant de GNL croate sur l’île touristique de Krk ou encore le gazoduc Eastmed reliant Israël à Chypre et à la Grèce. Ces projets représentent 338 gigawatts (GW) de capacités supplémentaires qui viendraient s’ajouter aux 2 000 GW déjà existants alors que pour tenir ses objectifs climatiques, l’UE devrait baisser sa consommation de gaz de 29 % d’ici 2030.

Pour le cabinet de conseil Artelys, qui vient de publier un rapport (1) pour la Fondation européenne pour le climat, ces projets gaziers ne sont pas nécessaires du point de vue de la sécurité d'approvisionnement et sont susceptibles d’entraîner un gaspillage de 29 milliards d’euros de fonds publics. Le document montre en effet que les infrastructures gazières existantes sont suffisantes pour répondre aux futurs scénarios de demande de gaz dans l'Union, même en cas de perturbations extrêmes de l'approvisionnement.

"La liste PCI est établie sur la base des travaux de nombreux experts et reflète les besoins des États membres pour achever et intégrer leurs marchés de l'énergie avec un approvisionnement sûr, abordable et durable. Les projets en question doivent donc être considérés comme valables et comme un élément nécessaire de l'infrastructure énergétique de l'UE", a de son côté expliqué James Watson, le secrétaire général d'Eurogas, l’association européenne du gaz. Mais certains remettent en question les projections retenues car elles sont établies par les plus grands constructeurs et exploitants de gazoducs d'Europe. 

Le GNL aussi néfaste pour le climat que le charbon

Une autre étude récente publiée par l'ONG Global Energy Monitor (2) a elle aussi recensé les projets gaziers européens, en y incluant les centrales à gaz et arrive à la même conclusion. Elle dénonce 117 milliards d’euros de dépenses "inutiles" (dont 20 milliards d'euros au Royaume-Uni). "L'UE dispose déjà d'une capacité d'importation représentant près du double de sa consommation et les centrales déjà existantes ne génèrent qu'environ un tiers de leur capacité électrique", préviennent les auteurs.

Le gaz est présenté par ses défenseurs comme une énergie de transition car lors de sa combustion, il émet moins de CO2, d’oxydes d’azote et de soufre que le charbon et le pétrole. Mais selon une récente étude de Bloomberg Green (3), l’empreinte carbone des nouvelles installations de gaz naturel liquéfié (GNL) aux États-Unis rivalise avec celles de l’industrie du charbon à cause notamment du méthane qui est relâché pour sa production. Or, l’Europe importe 70 % du gaz qu’elle consomme, majoritairement depuis la Russie par pipeline mais aussi du GNL provenant des États-Unis et du Moyen-Orient.      

(1) Voir le rapport d'Artelys 

(2) Voir le rapport du Global Energy Monitor

(3) Voir l'étude de Bloomberg Green

 

Au train actuel, la mort des pollinisateurs, la perte de vie dans les océans, l'érosion du littoral… va faire perdre 479 milliards de dollars par an à la planète d’ici 2050. Une perte économique qui va plonger dans la misère des millions d’humains. Dans ce sombre classement, la France se place au dixième rang des pays les plus touchés.

Donner une valeur à la nature est une gageure car les services qu’elle nous rend, à commencer par vivre, sont inestimables. Toutefois pour protéger quelque chose, il est dans la nature humaine de devoir lui donner une valeur. C’est ce qu’a essayé de faire le WWF dans son rapport "Global Futures", réalisé avec le Global Trade Analysis Project de l'université de Purdue et le Natural Capital Project de l'université du Minnesota aux États-Unis.

L’exercice a constitué à calculer le coût économique du déclin de la nature dans 140 pays. Au total, les auteurs prédisent la destruction de 479 milliards de dollars par an jusqu’en 2050, soit près de 15 000 milliards de dollars au total. Cela reviendrait à effacer chaque année les PIB cumulés du Royaume-Uni, de la France, de l'Inde et du Brésil.

Le WWF met en avant cinq raisons principales à cette perte économique annuelle. 327 milliards de dollars proviennent de la dégradation des zones côtières, due aux événements extrêmes et à l'élévation du niveau de la mer. 128 milliards de pertes de stockage du carbone qui protège du changement climatique. 19 milliards de dollars en raison de la réduction de la disponibilité en eau pour l’agriculture. 15 milliards de dollars en raison de la perte d'habitats pour les abeilles et autres insectes pollinisateurs. 7,5 milliards de dollars en raison de la perte de forêts et des services des écosystèmes forestiers.

Des pays pauvres encore plus pauvres

En valeur absolue, sans surprise, c’est la première puissance économique mondiale, les États-Unis, qui paient le plus cher. Cela représente une perte de "83 milliards de dollars par an d'ici 2050, un montant équivalent à la totalité du PIB annuel du Guatemala", explique le rapport. Suivent le Japon et le Royaume-Uni avec respectivement des pertes de 80 et 21 milliards de dollars par an. La France, quant à elle, arrive à la dixième place avec une perte de 8,4 milliards de dollars par an, dont 5 milliards dus à l’érosion des côtes et à la perte de ressources halieutiques.

En revanche, rapporté au pourcentage de PIB, cette perte économique due à la destruction de la nature change du tout au tout. Dans ce cas, ce sont les pays en développement qui sont les plus touchés avec 4,2 % de PIB en moins pour Madagascar qui est déjà l’un des pays les plus pauvres au monde, suivi du Togo qui perdrait 3,4 % et le Vietnam avec - 2,8 % de PIB. "Ce rapport nous prouve une fois de plus que nous ne pouvons pas envisager une société stable et juste si les forêts disparaissent, les pollinisateurs s'évanouissent, la biodiversité s'effondre et l'océan s'épuise", alerte Arnaud Gauffier, directeur des programmes du WWF France.

Celui-ci laisse un espoir toutefois : "il est encore possible d’inverser la tendance et réduire notre impact sur la nature, et l’année 2020 est une échéance cruciale à ne pas rater, avec le Congrès mondial de l’UICN à Marseille et la conférence mondiale pour la biodiversité en Chine. Le WWF appelle les États, les acteurs économiques, financiers et locaux à prendre des engagements pour la protection de la nature pour parvenir à un accord global ambitieux".

NOVETHIC

Tidjane Thiam, directeur général de Crédit Suisse, vient d'annoncer sa démission. Malgré des résultats historiques, les affaires d'espionnage auprès d'anciens membres de la banque et de l'ONG Greenpeace, ont poussé le polytechnicien franco-sénégalais vers la sortie. Les ONG environnementales comptent maintenir la pression sur son successeur, Thomas Gottstein. 

Tidjane Thiam est l’autre patron emblématique débarqué la semaine dernière mais pour des raisons différentes d’Isabelle Kocher, la directrice générale d’Engie. Le polytechnicien franco-ivoirien recruté par le conseil d’administration du Crédit Suisse pour redresser la situation financière de la Banque il y a cinq ans, a été contraint à la démission, le 7 février, à cause de la multiplication de scandales d’espionnage, le dernier en date concernant Greenpeace Suisse.

"Espionner des organisations et des personnes qui émettent des critiques est particulièrement condamnable. Nous appelons Crédit Suisse à assumer ses responsabilités en matière de climat au lieu de s'opposer au mouvement climatique. Pour cela, la banque doit établir des stratégies contraignantes afin de rendre ses flux financiers climatiquement neutres d'ici 2030 au plus tard". Le communiqué, publié le 6 février par Greenpeace Suisse, est laconique mais ferme. Iris Menn, sa Directrice générale, profitait de l’émoi causé par les nouvelles révélations sur le scandale d’espionnage au Crédit Suisse pour rappeler la Banque à ses devoirs climatiques en lui demandant de "mettre un terme immédiat à ses liens d'affaires avec des entreprises dont l'activité est liée au charbon, aux sables bitumineux et aux autres formes d'hydrocarbures non-conventionnels".

Affaires d'espionnage

Le lendemain 7 février, c’est en fait le Directeur Général Tidjane Thiam qui a dû mettre un terme à son mandat, le conseil d’administration estimant qu’il fallait ainsi répondre aux scandales d’espionnage qui défraient la chronique helvète. Il va quitter officiellement ses fonctions lors de la présentation des résultats le 14 février alors que ce seront les meilleurs affichés par la banque depuis 2015. Pour l’éditorialiste du journal Le Temps : "Le Franco-Ivoirien, époustouflant dans ses capacités d'analyse, quitte pourtant Crédit Suisse, viré par le clan suisse alors qu'il avait le soutien des financiers anglo-saxons". 

La démission de Tidjane Thiam est l’épilogue d’une affaire qui a démarré en septembre 2019 quand sa garde rapprochée a été mise en cause pour avoir espionné Iqbal Kahn, ancien responsable de la gestion de fortune parti dans la Banque rivale UBS. L’affaire relancée en décembre, s’est accélérée avec les révélations, le 2 février, du journal du Dimanche suisse Sonntagszeitung qui affirmait que le Crédit Suisse avait aussi espionné Greenpeace pour découvrir quelles actions fomentait l’organisation environnementale contre la banque après avoir envahi son Assemblée Générale en 2017. Sans que des preuves du rôle actif joué par Tidjane Thiam dans la mise en place de cet espionnage aient été rendues publiques, ce contexte a permis au président de la banque Urs Rohner avec qui les tensions étaient très fortes, d’obtenir son départ. 

La banque mise sous pression par les ONG environnementales

Le Crédit Suisse a donc défrayé la chronique et lavé son linge sale sur la place publique dans un contexte où la banque est effectivement la cible d’attaques d’ONG environnementales qui voudraient qu’elle adopte une stratégie climat ambitieuse. En janvier, des activistes sont ainsi venus mimer une partie de tennis au siège de la banque pour interpeller le champion de tennis Roger Federer sur son partenariat avec Crédit Suisse. Poursuivie en justice, les activistes ont été acquittés, le juge estimant que leur action de désobéissance civile n’était pas condamnable compte tenu de l’urgence climatique.

Un nouvel épisode se dessine avec le procès, le 18 février, d’un autre militant qui a posé une main rouge sur les vitres de la banque pour les mêmes raisons. Les soutiens de la campagne Discredit Suisse ont d’ores et déjà prévu de manifester et de transmettre le rapport du GIEC pour sensibiliser, le successeur de Tidjane Thiam, le banquier suisse Thomas Gottstein, à la crise climatique. Le bras de fer continue !

NOVETHIC

Le bateau laboratoire Energy Observer, premier navire capable de produire son propre hydrogène, va mettre à l'épreuve ses technologies innovantes en partant la semaine prochaine pour un tour du monde de plusieurs années, ont annoncé mercredi les organisateurs.

Depuis sa première expédition en juin 2017, ce laboratoire énergétique couvert de panneaux photovoltaïques (désormais 202 m2) a parcouru plus de 18.000 milles nautiques, utilisant l'énergie solaire, l'hydrogène produit par électrolyse à partir de l'eau de mer et depuis l'an dernier des ailes rigides automatisées baptisées "Oceanwings".

Avec ce mix énergétique 100% renouvelable, le navire a réussi à rejoindre l'été dernier l'archipel du Svalbard, dans l'océan arctique.

"On a poussé nos technologies dans leurs retranchements et elles ont tenu le coup" dans des conditions extrêmes de chaud et de froid, a souligné lors d'une conférence de presse le chef d'expédition Jérôme Delafosse.

 

Prêt pour des traversées plus longues et vers des lieux encore plus isolés "exposés aux conséquences de la dépendance énergétique et du réchauffement climatique", Energy Observer doit quitter Saint-Malo la semaine prochaine (lundi ou mardi selon les conditions météo) d'abord pour une traversée des océans Atlantique et Pacifique jusqu'à Tokyo pour les Jeux olympiques.

"C'est presque un tour de la Terre pour rejoindre Tokyo en août 2020. C'est une étape symbolique pour ces JO placés sous le signe de l'innovation et de l'hydrogène", a commenté le fondateur et capitaine Victorien Erussard, ravi que son compère et lui fassent partie des porteurs de la flamme olympique au Japon.

Après une nouvelle traversée du Pacifique pour une escale en Californie, ils mettront le cap sur les Galapagos, puis le Pacifique Sud, avant l'Australie en 2021. Leur périple qui doit s'achever en septembre 2023 au pied des Nations unies à New York les mènera aussi en Chine, en Inde, en Afrique australe ou encore en Amérique du Sud.

 

Pour que le navire supporte ce tour du monde de trois ans en totale autonomie énergétique, les équipes de l'Energy Observer ont travaillé ces derniers mois pour faire encore évoluer les technologies à bord.

La surface de panneaux solaires a été à nouveau augmentée, une nouvelle pile à combustible développée par Toyota a été installée et des hélices prototypes dont l'angle des pales est adaptable seront testées.

A terme, "l'idée est de rendre les technologies abordables au plus grand nombre", pour répondre à l'"urgence" climatique, a souligné Victorien Erussard.

Les porteurs du projet espèrent notamment que les Oceanwings, qui augmentent la vitesse et soulagent les moteurs, puissent être adaptées aux cargos de transport maritime.

L'ancien catamaran de 30,5 m de long pour 12,80 m de large, était à l'origine un voilier de course construit en 1983 au Canada.

© 2020 AFP

Debout sur des monticules de bois incandescent, le visage couvert de suie et de sueur, Said Mahrous et ses compagnons produisent du charbon de bois dans le petit village d'Inshas en Egypte, inhalant constamment de la fumée.

Ces artisans du charbon charrient chaque jour des tonnes de bois qu'ils transforment eux-même en charbon en le carbonisant.

Niché dans écrin de verdure au coeur du Delta du Nil, le village d'Inshas et ses maisons de brique n'est qu'à une cinquantaine de kilomètres au nord du Caire.

Une douzaine d'hommes, des habitants du village de tous âges, passent leurs journées de travail au milieu des fumées, sans porter de masques ou même de gants pour certains, le tout pour un maigre salaire mensuel d'environ 2.000 livres (115 euros).

Loin des préoccupations environnementales, ils remplissent des sacs de charbons toute la journée avant de les expédier dans tout le pays.

Les morceaux de bois, des bûches débarrassées de leurs branches, sont entassés les uns sur les autres.

Selon les arbres utilisés, le charbon n'a pas les même propriétés: le manguier et l'oranger sont transformés en charbon pour les narguilés, très populaires en Egypte, tandis que le camphrier, les casuarina et l'olivier sont utilisés pour produire du charbon destiné aux barbecues.

Le bois utilisé "doit être séché, ce qui prend environ un an", explique M. Mahrous, 48 ans, debout devant un tas de charbon.

"Ensuite on construit un fourneau, on jette de la paille de riz et on allume le feu qui dure 10 à 15 jours", dit-il à l'AFP.

Le feu est refroidi à l'aide d'un tuyau d'arrosage, mais le tas continue de se consumer de l'intérieur et la fumée s'élève alors dans les airs.

Une fois la combustion terminée, les hommes, équipés d'outils rudimentaires, brisent les morceaux de charbon et les tamisent manuellement avant de les mettre dans des sacs.

Si le bois est produit localement, il est relativement rare dans un pays majoritairement désertique comme l'Egypte. Deux tonnes de bois sont nécessaires pour obtenir une tonne de charbon.

© 2020 AFP

Le géant pétrolier britannique BP, sous pression pour réduire son impact environnemental face à l'urgence climatique, s'engage à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, tout en restant très flou sur la manière d'y parvenir.

Cet objectif, dévoilé mercredi par le groupe, est porté par le nouveau directeur général Bernard Looney, en poste depuis une semaine et qui promet dans un communiqué de "réinventer BP".

Les groupes pétroliers, l'une des industries les plus polluantes de la planète, sont attendus au tournant par la société et les mouvements écologistes mais aussi par de plus en plus d'investisseurs sur la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.

BP explique que son engagement porte sur les émissions polluantes de ses propres activités, ainsi que celles liées au pétrole et au gaz qu'il produit.

 

Il donne peu d'éléments sur les mesures qu'il compte mettre en place, si ce n'est qu'il veut augmenter la proportion, encore très limitée, de ses investissements dans des activités plus vertes, actuellement autour de 5%, sans toutefois donner de chiffres sur la part dorénavant visée.

BP veut en outre réduire de 50% l'intensité carbone (la quantité de gaz à effet de serre émise par unité d'énergie produit), d'ici 2050, des produits qu'il vend à ses clients, et réduire les émissions de méthane (un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le CO2), sur toutes ses opérations de production d'hydrocarbures.

"Nous avons besoin d'une transition rapide vers la neutralité carbone. Ce sera certainement un défi mais également une fabuleuse occasion", a prévenu M. Looney.

Interrogé par l'AFP juste avant sa première prise de parole en tant que patron de BP, il a expliqué qu'il s'agissait d'une "première étape". "Nous donnerons les détails au fur et à mesure" mais "les dépenses en capital sont cruciales", a-t-il complété

 

Lors d'une présentation, il a reconnu que la production de pétrole et de gaz de BP "va baisser au fil du temps" afin de respecter son objectif, sans exclure de possibles cessions d'actifs.

Il veut construire le portefeuille énergétique le moins polluant possible en réduisant les investissements en hydrocarbures pour se focaliser sur les plus rentables tout en rendant son groupe plus efficace.

Le dirigeant a assuré qu'il en dirait plus sur sa stratégie en septembre prochain. "Nous sommes vus par beaucoup comme une source du problème. J'ai compris cela", a-t-il lancé.

Les ONG n'ont de leur côté pas caché leurs doutes.

- Questions sans réponses -

"Des questions pressantes restent sans réponse. Comment vont-ils atteindre la neutralité carbone ? Est-ce que ce sera grâce à la compensation carbone?", s'interroge Charlie Kronick, un responsable de Greenpeace pour le Royaume-Uni.

La compensation consiste à financer des projets dits "verts" (comme la reforestation) qui permettent d'absorber du CO2, face aux émissions carbone des industriels.

 

Teresa Anderson, pour ActionAid, a estimé auprès de l'AFP que les annonces de BP montrent "combien il est facile d'utiliser de vagues objectifs de neutralité carbone tout en continuant comme d'habitude".

BP va devoir convaincre en outre ses actionnaires, puisqu'il réalise l'essentiel de ses confortables bénéfices grâce aux hydrocarbures.

"Nous ne pouvons repenser l'énergie que si nous sommes solides, capables de payer des dividendes à nos actionnaires et de générer assez de trésorerie pour investir dans des activités à faible émission carbone", souligne M. Looney.

Le dirigeant va entreprendre une réorganisation du groupe, en mettant fin à la séparation de ses activités entre l'amont (exploration et production) et l'aval (raffinage). Il propose à la place un groupe plus intégré composé de 11 équipes dont une dédiée au gaz et à l'énergie verte.

 

- Peut mieux faire -

Les objectifs climatiques dévoilés par BP restent toutefois parmi les plus ambitieux de l'industrie pétrolière, même si le norvégien Equinor vise la neutralité carbone d'ici 2030.

Son concurrent, le groupe anglo-néerlandais Royal Dutch Shell, se contente de vouloir réduire de 50% son empreinte carbone d'ici 2050. Le français Total, assigné en justice en France pour "inaction" climatique, assure lui développer des énergies moins polluantes.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE) avait estimé le mois dernier que le secteur pétrolier et gazier pouvait "faire beaucoup plus" pour répondre à la crise climatique et respecter les accords de Paris.

Dans un rapport publié mercredi, l'ONG WWF a prévenu que l'inaction climatique pourrait coûter 479 milliards de dollars chaque année à l'économie mondiale d'ici 2050, en raison de la perte de zones agricoles et de l'érosion des côtes.

© 2020 AFP

Le projet Indigo, qui vise à créer des engins de pêches biodégradables (filets, casiers, etc.), en vue de réduire les déchets marins et leurs conséquences "dévastatrices" pour l'environnement, a été lancé mercredi à l'Université de Bretagne Sud.

"Les engins de pêche, avec une durée de vie estimée à plusieurs centaines d'années, représentent 27% des déchets marins générant plus de 26.000 km d'engins perdus chaque année dans la zone FMA (France Manche Angleterre, ndlr) et les conséquences pour l’environnement marin sont dévastatrices", décrivent les porteurs du projet dans un communiqué.

"Dans une démarche globale de réduction des déchets, il est primordial d’adapter la durée de vie du matériau à son utilisation", soulignent-ils.

De nombreux filets dérivants continuent de capturer des poissons pendant plusieurs années. Ce phénomène, appelé "pêche fantôme" ("ghost fishing" en anglais), affecte la biodiversité marine. Il ampute également le chiffre d'affaires des pêcheurs de plusieurs dizaines de millions d’euros chaque année.

 

Le projet Indigo a obtenu, fin 2019, un financement du programme européen de coopération Interreg France (Manche) Angleterre à hauteur de 2,9 millions d'euros, pour un budget total de 4,2 millions d’euros sur trois ans.

L’Université Bretagne Sud est cheffe de file du projet, avec son plateau technique ComposiTIC, spécialisé dans la conception de matériau innovant. Son laboratoire Lab-STICC intervient pour impliquer les professionnels de la pêche et de l’aquaculture et étudier l’appropriation des nouveaux filets.

Six institutions de recherche (Universités de Bretagne Sud, de Plymouth et de Portsmouth, Ifremer, CEFAS et SMEL) et quatre partenaires privés (NaturePlast, Filt, IRMA et Marine South East) de France et du Royaume-Uni collaborent au projet Indigo (Innovative fishing gear for ocean).

© 2020 AFP

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